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1001 classiques
15 juillet 2014

La locandiera de Goldoni : ISSN 2607-0006

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Surnommé le "Molière italien", Goldoni ( biographie sur le site Larousse), avec La Locandiera, a écrit une petite comédie, en trois actes, réjouissante où on retrouve avec plaisir tous les procédés comiques traditionnels comme le comique de caractère avec un protagoniste obsédé par sa haine des femmes, ou un marquis imbu de ses prérogatives nobiliaires.

Pour punir un chevalier misogyne, Mirandoline, une hôtelière, décide de le séduire. Elle use de tous les artifices féminins : évanouissements, propos flateurs... Dans son avis au lecteur, Goldoni parle de cette pièce en ces termes : ce serait une pièce " la plus morale, la plus utile, la plus instructive". Quelle est la leçon de cette pièce ? Empêcher les hommes de tomber dans les " périls" de la séduction féminine ? Cependant, on voit bien que le Chevalier n'est nullement guéri de son défaut et en parlant des " funestes pouvoirs" des femmes, il semble encore plus l'ennemi des femmes qu'au premier acte. Son défaut n'en est que plus renforcé ! Quant à la manipulatrice, elle s'en tire à bon compte. Peut-on encore parler de morale ?

Cela a le mérite de souligner la complexité de cette pièce, dont les caractères ne sont pas facilement cernables comme dans la commedia dell'arte. Justement, l'édition folio bilingue présente quelques pages en couleurs, représentant le théâtre de l'époque, reproduisant des tableaux des pièces de Goldoni.

A ces illustrations  s'ajoutent des commentaires sur la réforme goldonienne : l'apprentissage des textes par les acteurs qui remplace les lazzi, l'absence des masques, et l'abandon des types. C'est d'ailleurs ce théâtre réformé qu'il met en scène dans La locanderia. A la fin de l'acte I, deux comédiennes apparaissent. Quel est leur rôle ? Quel lien avec l'intrigue ? Elles feignent d'être des dames nobles mais leur jeu issu de la commedia dell' arte est si caricatural que Mirandoline les démasque vite. Leur attitude et propos s'opposent au naturel de Mirandoline qui joue les séductrices avec tant de vraisemblance que le Chevalier tombe dans son piège : ne peut-on pas y voir le triomphe du théâtre réformé de Goldoni ? Assurément une pièce très enlevée qui fait découvrir le théâtre italien du XVIIIeme siècle et qui vaut bien à Goldoni son surnom de " Térence de l'Adriatique".

Goldoni, La Locandiera, Folio bilingue, 284 p.

Participation au challenge mélange des genres de Miss Léo ( mon bilan)

Lecture commune avec Claudia et Margotte.

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24 octobre 2015

La fractale des raviolis de Raufast : ISSN 2607-0006

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http://www.folio-lesite.fr/Catalogue/Folio/Folio/La-fractale-des-raviolis

Une femme décide d'empoisonner son mari infidèle grâce à son plat favori - les fameux raviolis présent dans le titre - mais leur voisi amène son fils à ce moment-là. Que faire ? La fractale des raviolis est-il un roman policier ? Certes, non, pas au sens traditionnel du terme, étant donné que ce roman enchâsse de courtes histoires appartenant à des genres très variés. Au détour du récit, on peut rencontrer des humanoïdes, un usurpateur d'identité au XVIIIeme siècle, un arnaqueur des cimetières...

A contrario des mécaniques bien huilées, l'imprévu, la fatalité, alimentent cette fiction fantaisiste. Qui est la vierge de Barhofk ? Qu'appelle-t-on le syndrome Sheridan ? Notre curiosité ne cesse d'être attisée. Malgré des invariants - la fameuse fractale - comme des personnages atypiques tueurs d'enfants ou des rats-taupes, on ne s'ennuie pas un instant grâce à l'humour noir de l'auteur qui sauve le roman de l'exercice de style accumulant des variations sur le même thème.

C'est donc avec virtuosité et jubilation que Rufast nous entraîne dans des intrigues machiavéliques, étonnantes et sanguinaires, mêlant science et littérature. Cependant le récit est véritablement divertissant et la chute des plus surprenantes vient couronner ce roman à savourer sans modération. Quelle inventivité ! Quel suspense ! Un premier roman machiavéliquement construit !

Partenariat folio.

Billets de Plaisir à cultiver, Dasola, Keisha, Noctembule,

30 août 2013

"Sur des aventures que je n'ai pas eues" de Lucien : ISSN 2607-0006

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"L'effectif de notre armée était de cents milles hommes, sans les porteurs, les hommes du génie, les fantasins et les auxiliaires ; sur ce nombre, il y avait quatre-vingt mille cavaliers- Vautours et vingt mille autres cavaliers montés sur des salades ailées. Ces salades aillées sont d'énormes oiseaux qui en guise de plumes, ont le corps hérissé de salades et des ailes faites de feuilles très semblables à celles de la laitue. ( p. 18 )" Dans sa captatio benevolontiae, Lucien affirme "qu"il est un point sur lequel [il dira] la vérité, c'est qu'[il] raconte des mensonges" ! Le pacte de lecture ainsi conclu, Lucien parodie allègrement tous ces auteurs qui parsèment leur récit d'allégation de véracité alors même que leurs histoires paraissent invraisemblables, notamment Homère, qui pour lui, ouvre la voie de la " charlatanerie" ! De manière burlesque et avec beaucoup de fantaisie, Lucien raconte donc ses aventures maritimes mensongères, puisqu'il avoue modestement qu'il ne lui est rien arrivé qui vaille la peine d'être raconté, et ses rencontres avec des tritonbouc (personnage moitié bouc et moitié espadon) ou des tête-de-thon au nom éloquent dans le ventre d'une baleine. On peut aussi reconnaitre parodié l'épisode des sirènes homériques ou une caricature du séjour des bienheureux d'Hésiode avec un Ulysse regrettant sa Calypso ! Le décalage entre les situations triviales et les héros antiques crée la vis comica.

Quelle imagination débridée ! Quelles extravagances critiques ! C'est avec jubilation qu'on découvre ce monde de fantaisie avec des imitations burlesques particulièrement réussies des grands textes antiques et on songe aussi à la postérité de Lucien : les guerres des salades ailées  et des bombardiers-ails sur la lune inspireront Cyrano de Bergerac mais alimenteront aussi la fantaisie rabelaisienne et ses fameuses guerres andouilliques dans le très lucianesque Quart-Livre.

Lucien, Sur des aventures que je n'ai pas eues, Folio, 81 p.

Merci aux éditions Folio et à Lise pour ce partenariat.

4 avril 2014

Au mois d'avril 2014 : ISSN 2607-0006

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Van Gogh/Artaud, Le suicidé de la société : Voici une exposition au Musée d'Orsay qu'il faut aller voir. Niki en parle ici.

A ne pas rater, non plus, ce roman de Solomons qui a plu aussi bien à Soie ( Jack Rosenblum rêve en anglais), qu'à Keisha, qui parle d'intégration et d'une évocation rêvée de l'Angleterre et dont je retiens une belle citation : " Nous ne devons pas être des coquelicots dans un champ de blé". Autre roman parlant de l'Angleterre mais sur un aspect bien plus sombre, c'est Harriet de E. Jenkins lu par Lou et Titine. Je signale que notre Sherlock Holmes favori reprend du service - diffusion du cercueil vide actuellement - et que deux "making off" ( "Sherlock Holmes : l'héritage" et "Sherlock Holmes : l'enquête") permettent de connaître les sources, coulisses et secrets de tournage sur France 4. Quant à Luocine, avec un doux parfum de scandale, elle s'est intéressée à la presse à scandale anglaise.

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Avec la commération de la première Guerre Mondiale, de nombreux films et livres parlent de cette période mais aussi de la seconde Guerre Mondiale : Luocine évoque le film Ida de Pawel Pawlikowski, et lu Kinderzimmer de Valentine Goby, Hanns et Rudolf de Thomas Harding, Lilly et Aaliz ont lu Après de Remarque, Keisha a aimé la correspondance de Romain Rolland et Sweig, et Dasola nous parle du film Diplomatie de V. Shlöndorff.

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Malgré des déluges d'éloges, j'ai abandonné Le mystère Sherlock de J. M. Erre dont le comique de répétition est assez excessif et pesant. En revanche, le roman policier Le code 1879 de Dan Waddell présente une intrigue terriblement efficace : les recherches policières sont menées par un enquêteur peu commun, un généalogiste, et le lien entre meurtre et société victorienne est bien tissé. ( Lu par Val, Lou, Titine, Shelbylee, Miss Léo, Soie...).

Sont venus rejoindre ma PAL, La marque de Windfield de Ken Follet - merci soie  - et le code Rebecca de Ken Follet, Le grand cahier de Kristoff, HHHH de Laurent Binet, Dans le jardin de la bête d'Erick Larson, L'origine du mal de Humbert, Le problème Spinoza et Nietzsche a pleuré de Yalom, Shakespeare notre contemporain de J. Kott. Bonne lecture !

6 juin 2015

La littérature Droodienne : ISSN 2607-0006

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Dernier roman inachevé de Dickens ( biographie sur le site Larousse), Le mystère d'Ewin Drood relate l'histoire du héros éponyme qui est destiné à épouser Rosa Bud, mais il disparaît la veille de Noël. Disparition ? Meurtre ? Et pour quelles raisons ? Est-ce son oncle opiomane, John Jasper qui l'aurait supprimé car ce dernier est secrètement amoureux lui aussi de la jeune fille ?

Le roman étant inachevé, fleurit alors une littérature droodienne : les writers on Ewin Drood cherchent à élucider ce mystère. Mais bien d'autres questions se posent : Drood est-il mort comme le pensent "les croquemorts" contrairement aux "résurrectionnistes" ? Et qui est Datchery ? Quel aurait été le rôle de ce personnage apparaissant tardivement dans l'histoire ? Le suspense est à son comble mais il ne faut pas oublier la comique galerie de portraits des habitants de Cloisterham où Dickens excelle.

Le personnage qui me semble coupable est bien évidemment Jasper comme le pense les "Jasperiens". Pourtant cette solution ne me satisfait pas car elle paraît trop évidente et elle est dictée par mon antipathie pour le personnage. D'ailleurs, les autres personnages - que ce soit Edwin, Rosa... - ne sont pas très reluisants. A bien y regarder, l'intrigue est particulièrement complexe car elle fait apparaître de nouveaux personnages comme Mr Tartar et des nouvelles données au fur et à mesure de l'enquête. Et dans ce cas, quel serait le rôle d'Helena, qui est loin d'être secondaire ?

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Dan simmons est l'un de ces writers on Edwin Drood. Il n'écrit pas la suite du roman mais plutôt son propre roman à sensations, racontant les origines du roman écrit par le célèbre auteur de Notre ami en commun. "Comme tu n'es pas sans l'ignorer cher lecteur, au XIXeme siècle, le roman feuilleton, sensationnel faisait fureur. Parmi eux, Drood tient une place mythique", écrit le narrateur de l'histoire qui est le non moins mythique Wilkie Collins. A partir d'un accident de train survenu à Dickens à stapehurst, et en s'appuyant sur des éléments biographiques véridiques, l'écrivain opiomane raconte les dernières années de la vie de Dickens.

Dans Simmons rivalise d'ingéniosité dans la construction de l'intrigue avec un auteur comme Collins. Aucun temps mort, il fait abonder les rebondissements, excepté lors des plaintes répétitives de Collins au sujet de ses maux et d'un certain scarabée égyptien.

Les bas-fonds de Londres, des temples égyptiens, un peuple d'en bas, le mesmérisme, des meurtres qui n'ont rien à envier à ceux de Jack l'éventreur révèlent l'imaginaire fertile de l'auteur. Il dresse aussi la peinture du Londres victorien, la fameuse " Babylone" et de la rivalité entre Dickens et Collins. Même si l'auteur de La dame en blanc noircit l'image de Dickens, ce dernier garde toute son aura. En ce qui concerne Collins, je ne sais pas quel est le degré de véracité des éléments biographiques mais ceux qui concernent Dickens sont très documentés ( une impressionnnate bibliographie en fin d'ouvrage montre la documentation de Simmons).

Deux romans à sensations terriblement bien réussis même si la fin absente du roman dickensien frustre ! ( l'édition archipoche propose une fin, celle de Paul Kinnet, mais elle me paraît bien simple et rapide). On peut mentionner l'existence d'un téléfilm BBC, une adaptation filmique assez plate du roman.

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Dickens, Le mystère d'Edwin Drood, Archipoche, 495 p.

Simmons, Drood, Pocket, 1204 p.

Le mystère d'Edwin Drood, téléfilm BBC, 2013, 1h42

 

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24 novembre 2018

Passage des ombres d'Indridason : ISSN 2607-0006

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https://www.audiolib.fr/livre-audio/passage-des-ombres-trilogie-des-ombres-tome-3-9782367627595

Dans le dernier opus de La tilogie des ombres, nous nous retrouvons dans deux époques différentes de L'Islande. Comme dans La femme de l'ombre et Dans l'ombre, "la situation" et l'histoire contemporaine sont évoquées en alternance. En effet, cette nouvelle enquête se présente comme une affaire non classée : un vieillard est retrouvé mort dans son lit avec de nombreuses coupures de presse sur une ancienne affaire de meurtre, celui d'une jeune femme morte dans le passage des ombres. Lorsqu'on découvre que ce vieil homme est Thorson, un enquêteur canadien  - qui venait en aide à Flovent dans les deux premiers opus de La trilogie des ombres -, un ancien inspecteur Konrad décide de reprendre l'affaire. Aurait-on assassiné Thorson ? L'affaire du meurtre du passage des ombres étant résolue, pourquoi Thorson continuait-il à être hanté par cette affaire ?

Indridason termine brillamment sa trilogie : enfin, il donne une grande place à l'histoire de l'Islande, non pas comme un historien, mais en créant une atmosphère susceptible de rendre compte ce qu'a été "la situation", notamment pour les femmes islandaises. Trompées et abusées par des Américains, elles vivent une difficile condition. La domination danoise, les légendes populaires, le spiritisme, le comportement des élites, l'occupation américaine prennent de l'ampleur par rapport à l'enquête plutôt simple et laborieusement expliquée dans les derniers chapitrres.

Le récit rend passionnant cette période historique et renoue avec le style des premiers romans de l'écrivain islandais où le contexte historique avait une grande importance comme dans La femme en vert ou L'homme du lac. Les dernières aventures du duo d'enquêteurs sont encore lues avec brio par Philippe Résimond : sur le site vous pouvez écouter un extrait.

Passage des ombres, la trilogie des ombres, tome 3, Indridason, audiolib, texte lu par Philippe Résimont, 8h27

autres romans : Dans l'ombre, La trilogie des ombres, tome 1, Indridason, audiolib.

La femme de l'ombre, La trilogie des ombres, tome 2, Indridason

Hiver arctique, L'homme du lac, Indridason

Le lagon noir, Indridason

Sur le web : Ferniot Christine, "Le passage des ombres, Indridason", Télérama, mis en ligne le 26 avril 2018. URL : https://www.telerama.fr/livres/passage-des-ombres,n5620571.php 

Partenariat Audiolib

4 mai 2019

L'art de la joie de Goliarda Sapienza : ISSN 2607-0006

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 https://www.audiolib.fr/livre-audio/lart-de-la-joie-9782367628318

Comme le rappelle Julie Navarre dans la biographie radiophonique de Goliarda Sapienza, dans Une vie, une oeuvre, sur France culture, l'histoire de la publication de L'art de la joie est incroyable : la romancière a tout vendu pour pouvoir écrire ce roman et il a fallu plus de 20 ans pour qu'il soit publié. Sa mort est passé inaperçue de même que cette oeuvre, traduite seulement en 2005 en français.

Dans L'art de joie, Modesta enfant est abusée par un homme inconnu, se présentant comme son propre père, ( l'est-il vraiment ?) et pour échapper à un destin misérable entre une mère pauvre et une soeur qui a le syndrome de Down, elle brûle sa maison et sa famille. Recueillie dans un riche couvent, elle apprend la musique, l'astrologie et à écrire, " même si on lui apprend que la femme ne peut jamais parvenir au savoir de l'homme". Cependant, elle déteste l'univers catholique dans lequel on essaie de plier son corps et sa morale. "Il fallait agir", se dit-elle. Ayant obtenu les faveurs de la mère supérieure, à sa mort, à laquelle Modesta n'est pas étrangère, elle se retrouve propulsée dans le monde.

Personnage hypocrite, mais animée par la soif du savoir, elle admire la princesse chez qui elle est recueillie parce qu'elle est "une femme volontaire et forte comme un homme". Comme les picaros du XVIIeme siècle, Modesta va traverser tous les milieux et indirectement, à travers les dialogues des personnages, on découvre la vie des couvents sicilens au début du XXeme siècle mais aussi celle des aristocrates et des allusions politiques évoquent Mussolini et la guerre. Comme les traditions sont tenaces ! Etre athée signifie être un hérétique en ce début de siècle. Saisissant toutes les opportunités, l'héroïne devient peu à peu la "petite patronne" du domaine de la princesse. Comme Le guépard de Lampedusa, L'art de la joie évoque le déclin de l'aristocratie.

La voix vive de Valérie Muzzi ( écouter un extrait ici) convient parfaitement avec l'itinéraire extraordinaire de Modesta et son caractère volontaire. Les petits préludes musicaux introduisant les plages d'écoute - même si elles sont très courtes - semblent changer, ce qui rompt la monotonie. Les plages brèves permettent une écoute quel que soit l'endroit où vous êtes et contribuent à la vivacité du récit. On peut aussi souligner la performance de cette lectrice au vu de la longueur du roman. Toutefois, on peut regretter des changements de voix exagérés, inutiles lorsque les lectures ont une telle qualité.

Cependant, j'ai arrêté l'écoute après la plage 71 sur les 107, après deux abandons passagers, car Goliarda Sapienza parle beaucoup du désir féminin dans ce roman : elle décrit donc avec de nombreux détails et longuement les scènes sexuelles qui sont nombreuses par moments. L'héroïne, par opportunisme ou par simple envie, couche susccessivement avec sa belle-soeur, et les nombreux hommes qui passent à portée de sa main tels que les fils de son premier amant, le mari de sa belle-soeur, ou Joyce qui vient de tenter de suicider... Les scènes crues dérangent par leur fréquence et leur mièvrerie digne d'une arlequinade ou d'un roman érotique, au point que je redoutais la suite...

Les qualités sont nombreuses dans ce roman mais je n'ai pas réussi à surmonter ma répugnance pour les futures scènes crues que je pressentais peut-être à tort... Alors que j'étais ravie de découvrir cette auteure italienne, j'ai finalement été déçue par ces scènes gênantes et maladroitement écrites.

L'art de la joie, Goliarda Sapienza, Audiolib, lu par Valérie Muzzi, 23h10, 2019.
Audiolivre lu dans le cadre du Prix Audiolib 2019.

Sur le web : Une vie, une oeuvre. 2018. "Goliarda Sapienza ( 1924-1996) : La madone indocile". Animée par Julie Navarre. Diffusée 14 avril 2018.

 Landrot Marine, " trois raisons de (re)lire "L'art de la joie" de Goliarda Sapienza", Télérama, mis en ligne le 5 mai 2015. URL : https://www.telerama.fr/livre/trois-raisons-de-re-lire-l-art-de-la-joie-de-goliarda-sapienza,126102.php

 

5 septembre 2019

La servante écarlate de Margaret Atwood : ISSN 2607-0006

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Publié en 1985, La servante écarlate a permis à Margaret Atwood de connaître un succès international bien mérité. Ce roman de SF critique une société où la femme est aliénée. L'univers de La servante écarlate est vu à travers le point de vue interne et les sensations du personnage principal. Au gré de ses déplacements, elle décrit, raconte comment la société est devenue une tyrannie appellée la république de Gilead. Nous découvrons donc qu'elle est une Servante, destinée à la reproduction, qui vit chez un Commandant et sa femme. Dans cette société très hiérarchisée et surveillée, évoluent aussi des Martha, des Gardiens...

A quoi ressemble la République de Gilead ? Comment cette tyrannie a pu s'installer ? A travers une écriture extrêmement visuelle, Defred, la Servante, décrit les pendaisons des anciens médecins qui ont aidé des femmes à avorter, des guerre avec d'autres pays  - l'Amérique centrale est aux mains des Liberthos. L'évocation de son passé permet de comparer sa vie antérieure avec le présent et de critiquer sa nouvelle condition où elle doit se taire. Evidemment, on frémit en suivant le parcours de la servante !

Emprisonnée, isolée, utilisée comme un objet, l'héroïne nous livre ses pensées tout en détaillant l'arrivée au pouvoir de cette secte, qui n'est pas sans rappeler d'autres dictatures qui ont réellement existé au XXeme siècle. Cet état des choses - la stérélité des femmes, le manque de produits frais - est expliquée par la pollution et la surconsommation, donnant une dimension écologique à ce roman : " la pêche en mer est défunte depuis plusieurs années ; les quelques poissons que l'on trouve maintenant viennent d'élevages et ont un goût de boue. D'après les informations, les régions côtières sont "mises au repos". Les soles, je m'en souviens, et le haddock, l'espadon, les coquilles Saint-Jacques [...] auraient-il tous disparu, comme les baleines ?" (p. 275).

Le succès de ce roman, dont le discours contestataire est toujours d'actualité et peuvent faire écho à des manifestations qui ont lieu au Brésil en 2018 par exemple, ne s'est jamais démenti et se poursuit avec la diffusion d'une série réalisée par Bruce Miller (2017) et la publication d'une suite du roman intitulé Les testaments annoncée pour le 10 septembre 2019 dans cet article du Monde. Angoissant et effrayant, ce livre mérite sa place, à côté de 1984 d'Orwell, dans la littérature dystopienne...

Atwood Margaret, La servante écarlate, Pavillon poche, Robert Lafond, Espagne, Octobre 2015, p. 520 p.

Autres romans : Captive,

Sur le web : a girl from eart

" bientôt une suite pour "La servante écarlate", Le monde, mis en ligne le 20 juin 2019. URL : https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/06/20/margaret-atwood-sortira-en-septembre-la-suite-de-la-servante-ecarlate-et-racontera-l-avenir-de-defred_5479332_3246.html

"La cour suprême brésilienne se saisit du débat de sur l'IVG", Le monde, mis en ligne le 7 août 2018. URL : https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2018/08/07/la-cour-supreme-bresilienne-se-saisit-du-debat-sur-l-ivg_5340080_3222.html

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https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2018/08/07/la-cour-supreme-bresilienne-se-saisit-du-debat-sur-l-ivg_5340080_3222.html

THE HANDMAID'S TALE Bande Annonce (2017) La Servante Écarlate, Série

22 octobre 2016

Giono de Pierre Citron : ISSN 2607-0006

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Se tenir à la réalité, " c'est préférer le code civil à Stendhal" :

Vous désirez connaître la vie de Giono et son oeuvre ? Pierre Citron a écrit une biographie simple et éclairante de la vie de l'auteur d' Un roi sans divertissement. Accompagnée de nombreuses peintures, photographies, illustrations, qui agrémentent la lecture, on peut découvrir un univers gionien très éclectique : dans ses premiers romans, comme Un de Baumugne, Collines, Regain dominent la nature. Puis, il a aussi écrit des récits pacifiques comme le Grand troupeau, les vraies richesses... Après la guerre, il écrira deux cycles très dissemblables : le cycle du Hussard et celui des chroniques présentant des romans très stendhalien comme Angelo ou des romans très sombres comme Les âmes fortes.

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"Giono est attablé au Contadour avec une de ses nombreuses pipes" 1938 ( p. 55)

P. Citron revient sur la légende d'un Giono collaborateur, évoque aussi l'épisode contadourien. Mais ce qui frappe dans cette oeuvre, c'est la liberté de forme et l'innovation narrative dont fait preuve Giono : non seulement, il invente sans cesse de nouveaux mots mais il n'use jamais de la même technique narrative. Admirateur de Faulkner, il crée même des oeuvres qui préfigurent les théories du Nouveau Roman. L'autre aspect permanent de cette oeuvre gionesque, c'est la royauté de l'imaginaire : dès La naissance de l'Odyssée, puis avec Jean le bleu (autobiographie) ou Pour saluer Melville ( biographie de Melville), Giono ne cessera jamais de mêler l'imaginaire et le réel. La province de Giono ? Elle est partiellement fictive. Noé, une autobiographie ? Il imagine autant qu'il raconte sa vie.

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Vallotton, Verdun, p. 16

Tout en narrant la vie de l'auteur et en résumant les oeuvres de celui-ci, Pierre Citron insiste sur des notions clés de l'oeuvre gionienne comme la générosité, la nature, la dimension métaphysique de ces oeuvres, la démesure des personnages... La collection écrivain de toujours permet une agréable rencontre avec un auteur...

Pierre Citron, Giono, écrivains de toujours, seuil, 183 p.

19 novembre 2016

Une femme/ la la honte d'Annie Ernaux : ISSN 2607-0006

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Comme dans La place, Une femme et La honte sont des récits autobiographiques. Dans Une femme, Annie Ernaux raconte la vie de sa mère, notamment sa maladie et sa mort. Encore un récit de soi français ? Encore une romancière qui s'épanche ? Non, ces deux courts récits ne sont pas un énième récit égocentrique, mais elle montre comment sa mère, issue d'un monde ouvrier a cherché à sortir de cette classe, en devenant commerçante. On découvre ses paroles, ses expressions, ses problèmes, ses liens avec sa fille.

Comme dans La place et contrairement à Rousseau qui se compare à Chérubin ou à un personnage picaresque, elle utilise volontairement "une écriture plate" sans fioriture. Outre, l'analyse anthropologique de la vie d'une femme dans la première moitié du XXeme siècle, la romancière mène une réflexion sur son écriture : pourquoi écrire ? Comment exprimer ses sentiments envers sa mère ? "Ce que j'espère écrire de plus juste se situe sans doute à la jointure du familial et du social, du mythe et de l'histoire[...] mais je souhaite rester, d'une certaine façon, au-dessous de la littérature". Annie Ernaux arrive avec beaucoup de justesse à nous décrire une relation complexe et touchante et l'étude sociale de la vie d'une femme du début du XXeme siècle, en Normandie.

Dans La honte, les mêmes caractéristiques d'écriture sont présentes que dans les deux romans précités : à cela s'ajoute de longues parenthèses, des réflexions sur l'écriture et sa fonction, et les récits de l'année 1952. Ce n'est plus toute une vie qu'on suit mais à partir d'un événement douloureux, l'auteur égrène les souvenirs et sa vie à cette époque. A partir des objets trouvés, elle évoque des épisodes familiaux comme un voyage à Lourdes ou la religion de sa mère... Les mots en italique ressuscitent toute une époque et un milieu. Annie Ernaux est bien "cette archiviste" dont elle parle dans Une femme : elle sait rendre vivante des époques entières. Un style à découvrir !

Annie Ernaux, Une femme, folio, 106 p.

Annie Ernaux, La honte, Folio, 142 p.

Annie Ernaux, La place,  folio, 114 p.

21 février 2022

Mexican gothic de Silvia Moreno-Garcia : ISSN 2607-0006

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Partons à la découverte des romancières mexicaines avec la lecture de Mexican gothic de Silvia Moreno-Garcia ! Avec un titre pareil, on s'attend donc à lire un roman faisant référence aux romans victoriens du XIXeme siècle, ce qui est tout à fait le cas avec la présence de brume, d'un cimetière anglais, d'un mystère bien dissimulé...

Catalina est une jeune fille romanesque, qui aime les romans des soeurs Brontë. Elle a suivi, dans un coin reculé du Mexique, son mari que sa famille connaît à peine car elle a tenu caché ce projet de mariage. Mais lorsque le père de sa cousine Noemi Taboado reçoit une étrange lettre où la jeune femme parle de fantômes enfermés dans les murs et d'empoisonnement, ce dernier envoie sa propre fille pour se faire une idée de la situation réelle de la jeune mariée.

Riche mondaine superficielle, Noemi découvre, en arrivant à El Triunfo, un affreux manoir dans lequel sa cousine est quasiment retenue prisonnière par une belle-famille encore plus affreuse. Faisant fi de la raison et du bon sens, notre héroïne capricieuse, qui a trop lu de contes de fées avec sa cousine, décide d'enquêter sur la mystérieuse maladie de celle-ci malgré tous les signes d'une catastrophe imminente : "La conversation s'acheva brutalement. Noemi regagna sa chambre, songeant aux contes de fées de Catalina. Il était une fois une princesse qui vivait en haut d'une haute tour. Il était une fois un prince qui l'aidait à s'en échapper. Noemi s'assit sur son lit et médita sur certains maléfices qui n'étaient jamais rompus. "(p. 138).

On ne sort pas enrichi de cette lecture fantastique et horrifique même si la romancière connaît bien ses contes de fées et qu'elle en fait une lecture très juste, pas du tout édulcorée comme dans les films Disney. Si le livre se lit rapidement et facilement, on peut déplorer une intrigue reposant sur une surenchère dans le glauque et dans le sordide et sur des clichés... sans compter les personnages caricaturaux : à aucun moment, on ne frissonne de peur pour nos deux Bovary mexicaines.

130672001Moreno-Garcia Silvia, Mexican gothic, Bragelonne, France, juillet 2021, 346 p.

Participation au road trip mexicain organisé par Rachel et A girl from earth

Lu par Rachel, A girl,

 

130702477Participation au Mois atino-américain organisée par book'ing et Goran.

 

1 mai 2015

Au mois de mai 2015 : ISSN 2607-2006

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Quelles sont les nouveautés du mois de mais 2015 ?

Je me demandais fébrilement quelle était la nouvelle importante à annoncer, l'événement marquant qui ouvrirait ce billet. c'est sur le blog de Titine que j'ai trouvé ce que je cherchais : elle annonce qu'avec ses deux acolytes, Lou et Cryssilda, elles renouvellent la saison 4 ! Regardez son site, et vous trouverez de nombreux rendez-vous autour de polars anglais, littérature enfantine anglaise, XXeme siècle anglais mais aussi des lectures communes de Dickens, Austen, Coe... Et pour parfaire, ce mois anglais, un magnifique logo nous accompagnera tout le mois de juin. A vos livres, préparez-vous pour le mois anglais ( chez titine, Cryssilda et Lou.).

Vus sur la blogosphère :

 Que s'est-il passé sur la blogosphère au mois d'avril ? Vous cherchez des romans drôles ? Rendez-vous sur le site de Keisha. Elle nous rpésente un roman hilarant qui raconte la vie d'un écrivain de SF: L'univers de carton, Christophe Miller sur le blog de Keisha.

Un essai ? Claudia nous propose de découvrir l'oeuvre de Montaigne à travers l'essai de S. Bakewell : Comment vivre ? Une vie de Montaigne en une question et 20 tentatives de réponses. Et on a envie de suivre l'injonction de ce célèbre humaniste : "Lisez pour vivre" !

Un polar ? Niki nous propose un roman policier mais qui se déroule dans l'athènes contemporaine pour changer des polars nordiques ou anglais : Le justicier d'Athènes de Petros Markaris.

Un nouveau roman gothique ? Le mange Livre nous dévoile l'intrigue du dernier J.C. Oates Maudits, qui renoue avec l'influence gothique de Bellefleur... 

Un film ? Jauja de Lisandro Alfonso, un film atypique, qui se déroule sur fond de Patagonie et d'une ville mythique, selon dasola et Alex 6.

Mes derniers achats :

- Le théorème du homard, G. Simmions

- La mort s'habille en crinoline, Duchon Doris

- Nature morte, Louise Penny

- Les falsificateurs, Bello

- La fin du monde a du retard, Erre

- Les poètes morts n'écrivent pas de romans policiers (merci Niki pour l'envoi !)

1 mai 2018

C'est le premier, je balance tout ( mai 2018) : ISSN 2607-0006

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Logo d'allez vous faire lire

1) MES EXPOSITIONS

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En 1863, à la mort de Delacroix, Fantin-Latour rend hommage au peintre dans une huile sur toile le représentant au milieu d'écrivains tels que Baudelaire ou de peintres comme Manet. Le Louvre aussi lui rend hommage, cette année, en retraçant toute la carrière du peintre romantique à travers ses journaux montrés en milieu de parcours, ses carnets de dessins, ses prises de notes, ses traductions et ses portraits.

La mort de Sardanapale est emblématique de l'art de Delacroix : se reférant à une tragédie de Byron, le peintre a représenté le roi assyrien dans une débauche de couleurs, de luxe, de violence et de corps nus. Le mouvement et le désordre dominent dans ce tableau. Les influences littéraires prennent une grande place dans les thèmes des tableaux : Delacroix a peint aussi bien Dante et Virgile aux enfers en 1922 que Hamlet et Horatio au cimetière.

De nombreux tableaux reflètent aussi les thèmes romantiques du désespoir et de la solitude que ce soit dans Jeune orpheline au cimetière ou Le naufrage de Don Juan. Toute une partie est consacrée aussi à l'Orient et aux commandes publiques, tableaux moins connus et moins spectaculaires, car Delacroix a été tiraillé sa vie durant entre l'art et les nécessités matérielles.

Exposition Delacroix (1798-1863) du 29 Mars 2018 au 23 Juillet 2018 au Louvre, site ici.

Delacroix, une liberté toute romantique, René Grimaud, 110 p.,  Geoart, Le monde.

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La mort de Sardanapale, Delacroix, 1827

2) MES FILMS

'Black Panther' Home Release Trailer

Il n'y a pas de politique dans Black Panther selon P. Rouyer (dans l'émission du cercle) mais le discours inverse est tenu par F. Saltiel dans le 28 minutes sur arte. Qu'en est-il ? T'Challa, la fameuse black Panther et roi du Wakanda, royaume d'une Afrique imaginaire, doit lutter contre Klaue qui cherche à voler les ressources du pays, le vibranium. Comme les traditionnelles adaptations des comics, Black Panther ne manque pas d'actions héroïques, de combats titanesques. Cependant, au cahier des charges attendu, le réalisateur Ryan Coogler a ajouté un conflit politique : le Wakanda doit-il rester en paix en ignorant les autres noirs souffrant dans le monde ou doit-il mener une politique internationaliste ? En outre, les images sont saupoudrés de références à la culture africaine et à l'histoire des noirs. Un super-héros supplémentaire ? Le film, valorise-t-il un message politique ? Les deux !

Film américain de Ryan Coogler. Avec Chadwick Boseman, Lupita Nyong’o, Michael B. Jordan, Daniel Kaluuya, Forest Whitaker, Martin Freeman (2 h 14).

Sur le web : Sotinel Thomas, "Black Panther" : L'afrique a enfin son super-héros sur grand écran, Le Monde, mis en ligne le 14 février 2018. URL :  http://www.lemonde.fr/cinema/article/2018/02/14/black-panther-l-afrique-a-enfin-son-super-heros_5256544_3476.html#YEoqe7Lfohyct3MH.99

BUFFET FROID (bande-annonce)

 Depuis Les valseuses, Blier ne cesse de provoquer le spectateur et de refuser un cinéma " bourgeois". En quelques semaines, il a écrit Buffet froid : si le scénario paraît des plus étranges, c'est que le réalisateur n'a gardé que tout ce qui était " dingue" ( déclare-t-il dans les bonus). En effet, Alphonse ( joué par Depardieu), un chômeur, rencontre un quidam dans le métro, près de la Défense. ce dernier meurt de manière étrange : il désigne Alphonse comme son meurtrier mais ce dernier n'était pas présent au moment de sa mort puisqu'on le voit déambuler dans les couloirs de la station de métro. Un film policier ? A première vue, une enquête semble s'amorcer avec la présence d'un inspecteur venu s'installer dans le même immeuble qu'Alphonse mais on découvre assez rapidement que ce dernier n'hésite pas à tuer et évite d'arrêter les meurtriers. Commence une " mécanique du meurtres" où toutes les paroles et actions des acteurs paraissent absurdes. Ce film présente des similitudes avec le théâtre de l'absurde : "Le langage s'était désarticulé, les personnages s'étaient décomposés" ( Notes et contre-notes de Ionesco). Ce long métrage du réalisateur français contient un humour noir et une dimension réflexive, qui n'a pas du tout mal vieilli.

Buffet froid, Blier, 1979, avec G. depardieu, Michel Serrault, Carole Bouquet...

3) MES ACHATS

Quelques achats sont venus grossir ma PAL : deux livres d'Eric Vuillard, Mémoire de fille d'Annie Ernaux, A l'orée du verger de T. Chevalier et Une mémoire infaillible de S. Martinez

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23 février 2019

L'Elixir de longue vie de Balzac : ISSN 2607-0006

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Popularisé par Molière qui fait de son Don Juan un libertin, ce personnage est promis à une longue postérité. Goethe, Byron, Delacroix, peintres et écrivains s'emparent du mythe. Don Juan Belvidero vit à Ferrare, dans la débauche, en attendant la mort de son père, Bartholoméo. Ce dernier, sur son lit de mort, lui révèle qu'il possède un Elixir capable de ressusciter les morts. Il lui demande donc de le frictionner entièrement avec le contenu de la fiole pour revivre. Don Juan constate la véracité des propos de son père en faisant un essai sur l'un des yeux du mourant et devient un paricide en décidant de l'étouffer. Il décide de garder l'Elixir pour lui-même. Face à ce père indulgent, Don Juan se comporte comme un égoïste. A son tour, devenu un vieillard, il fait la même requête à son fils.

Cette nouvelle renouvelle le mythe de Don Juan même si l'on retrouve quelques éléments anti-cléricaux dans le dénouement, le mariage avec Elvire et un libertinage de moeurs. Mais Don Juan n'est plus le libertin des siècles antérieurs. Balzac, sous l'influence du romantisme frénétique, transforme l'histoire en un conte fantastique, grotesque et horrifique : "Une assez violente rafale de lueur [...], illumina la tête de son père : les traits en étaient décomposés, la peau collée fortement sur les os avait des teintes verdâtres que la blancheur de l'oreiller, sur lequel le vieillard reposait, rendait plus horribles.[...] Malgré ces signes de destruction, il éclait sur cette tête un caractère incroyable de puissance".

Le rôle de l'argent, de l'héritage et de la paternité, présent dans La peau de chagrin, Le cabinet des antiques, Gobseck, et bien d'autres  oeuvres de La comédie humaine, en font un personnage et une histoire éminemment balzaciens. Dans cette Italie de la Renaissance de convention, puis dans une Espagne pittoresque, Balzac a su donner aussi une teinte romantique au mythe, renouvelant le type don juanesque en lui donnant une dimension faustienne, dans le défi avec la mort.

 Balzac Honoré, "L'Elixir de longue vie", Barcelone, Folioplus, 2014.

Lecture commune avec Miriam et Cléanthe. Prochaine Lecture commune : "Pierre Grassou" le 23 mars et "Melmoth réconcilié", le 23 mai.

La comédie humaine :

1 Scènes de la vie de province : Eugénie Grandet, Le cabinet des antiques

2. Scènes de la vie parisienne : La fille aux yeux d'or, La duchesse de Langeais

 3. Les études philosophiques : La peau de chagrin, L'auberge rouge, "L'Elixir de longue vie"

4. Scènes de la vie privée : Mémoires de deux jeunes mariées, Le père Goriot, Le colonel Chabert, Gobseck, "La bourse",

5. scènes de la vie de campagne : Le lys dans la vallée,

24 août 2009

Témoin indésirable d'A. Christie : ISSN 2607-0006

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Témoin indésirable, Tome 14, Agatha Christie, scénario et dessin de Chandre, Emmanuel Proust édition, 49 p.

Un soir, deux ans plus tard après l'assassinat d'une femme, un inconnu, le Dr Calagary vient bouleverser la tranquillité d'une famille en confirmant l'alibi du meurtrier : Jack Argyle. Celui-ci, violent et instable, aurait tué sa mère qui refusait de lui donner de l'argent. Le Dr Calagary n'a pas pu témoigner avant à cause d'une amnésie, due à un accident de voiture et d'une expédition scientifique.

Cette révélation jette le désordre au sein de la famille : qui est le véritable meurtrier de Mrs Argyle ? Son mari, qui souhaite se marier avec sa secrétaire, Gwenda Vaughan ? La domestique ? Elle aime tous les membres de la famille sauf la défunte ou Mary, Hester, Mikael et Tina, ses enfants adoptifs, qui étaient dépendants financièrement d'elle ?

L'adaptation en images ne gâche en rien cette enquête policière. L'intrigue complexe reste tout à fait compréhensible. Huis clos et drame familial créent un suspense cruel : chaque membre de la famille s'épie et se soupçonne. Les dessins aquarellés sont d'une facture très classique. Rien d'original, mais on passe un moment de détente à lire un classique de la littérature policière...

9 juillet 2022

Tonbo d'Aki Shimazaki (pentalogie au coeur du Yamato) : ISSN 2607-0006

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Que nous réserve la série romanesque Au coeur du Yamato, la deuxième pentalogie d'Aki Shimazaki ? La romancière présente la vie des employés de l'entreprise Goshima : Aori est l'employé modèle dans Mitsuba, dont le passé du supérieur est relaté dans Zakuro. A contrario, considéré comme un mauvais salarié, Nobu refuse une promotion à Sao Paulo. Il décide donc d'ouvrir un juku, un lieu de cours privé. Loin du monde de l'entreprise, Tonbo va s'attarder sur la vie du père de Nobu, un professeur de biologie. Ce dernier se suicide après un scandale : un de ses élèves, déjà malade, décède après avoir reçu une gifle...

Si l'écriture est toujours la même, succinte mais arrivant tout de même à exprimer des sentiments nuancés, divers et variés, la romancière arrive à nous surprendre par les thèmes abordés : la description de la vie et du quotidien de Nobu et de son juku permet d'aboutir à l'évocation du harcèlement scolaire, du financement des études, du choix des matières. Mais c'est moins le système scolaire que les problèmes entre adolescent qui seront au coeur du sujet de Tonbo. L'analyse des sentiments se fait toujours avec pudeur, sans pathos, sans outrance.

Par ailleurs, Tonbo signifie "libellule" : autour de cette signification, une légende et des chansons japonaises serviront aussi de fil rouge à cette histoire passionnante. En fermant le livre, on se demande qui seront les personnages principaux des derniers tomes de la pentalogie : Tsukushi et Yamabuki.

un été au JaponShimazaki Aki, Tonbo, au coeur du Yamato, France, 2014, 113 p.

Participation à un été au Japon organisé par Lou et Hilde. @unmoisaujapon #unmoisaujapon

du même auteur : Au coeur du Yamato, Mitsuba, Zakuro

Le poids des secrets : ( Wasurenagusa,Tsubaki, Hamaguri, Tsubame, Hotaru)

9 janvier 2010

Huis clos de Sartre : ISSN 2607-0006

 

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 Huis clos de Sartre est une courte pièce de 5 scènes réunissant 3 personnages principaux, Ines, Estelle et Garcin, qui vont s'affronter dans une salle figurant l'enfer. Garcin vient de mourir et est amené dans une pièce décorée avec des objets style Empire. Bientôt se joignent à lui deux femmes avec lesquelles il doit cohabiter.

"Garcin
Le bronze... (il le caresse.). Eh bien, voici le moment. Le bronze est là, je le contemple et je comprends que je suis en enfer. Je vous dis que je me tiendrais devant cette cheminée, pressant ma main sur ce bronze, avec tous ces regards sur moi. Tous ces regards qui me mangent... (Il se retourne brusquement.) Ha ! vous n'êtes que deux ? Je vous croyais beaucoup plus nombreuses (Il rit.) Alors c'est ça l'enfer. Je n'aurais jamais cru... Vous vous rappelez : le soufre, le bûcher, le gril... Ah ! Quelle plaisanterie. Pas besoin de gril : l'enfer, c'est les autres".

"L'enfer, c'est les autres".
Le dépouillement de la mise en scène permet la concentration de l'intérêt dans la construction de la relation entre les personnages. Dans l'enfer sartrien, nul besoin de glace, c'est que l'on se voit dans le regard de l'autre. Chacun des personnages cherchent à se cacher le motif de leur damnation mais ils ne peuvent échapper au regard d'autrui, à son jugement et sa ludicité. Les protagonistes ne sont ni des individus, ni des caractères, ce sont des consciences qui s'accomplissent les unes par rapport aux autres. L'homme est à la fois un être pensant et pensé.

Dans l'enfer sartrien, nul besoin de diables, de flammes ou de pals et pourtant il est peuplé de monstres. Brisant l'image d'Epinal, qui faisait de l'enfer une fournaise peuplée de démons tel que Bosch l'a représenté, Sartre ( une exposition virtuelle lui est consacré sur le site de la BNF) fait de l'homme un bourreau pour son semblable : l'homme est bien un loup pour l'homme. Si dans cet enfer, l'homme semble encore libre, cette liberté le renvoie à sa propre finitude : pourquoi faire des choix dans un lieu où n'existe plus la mort, seulement un présent éternel ? Théâtre d'idées, théâtre de l'existentialisme, Huis clos définit l'Enfer tout en montrant la tragédie du destin de l'homme... Dans cette ère de l'individualisme forcené, cette pièce philosophique est à méditer !

Sartre, Huis clos, Folio, 95 p.

6 janvier 2010

Thérèse Raquin de Zola : ISSN 2607-0006

9782253010074_TRoman du meurtre et de la folie, Thérèse Raquin est l'un des premiers romans écrit par Zola : beaucoup plus court que les livres du cycle des Rougon-Macquart, il porte déjà l'empreinte des théories naturalistes de Zola.
Thérèse Raquin est une jeune femme pleine de sensualité, qui dépérit au côté d'un mari souffrant et médiocre, Camille. Un jour, ce dernier ramène un camarade d'enfance, peignant à ses heures perdues, et fonctionnaire dans le ministère des chemins de fer comme Camille. Au premier regard Thérèse Raquin est subjuguée par cet homme. Commence une histoire d'adultère...

Thérèse Raquin comporte une intrigue très simple, celui d'un couple adultérin qui cherche à se débarrasser d'un mari devenu gênant. Les courts chapitres permettent de mettre rapidement en place l'intrigue. C'est un roman d'analyse, sans actions véritables, toutefois Zola tisse un réseau de symboles et d'échos signifiants lui permettant de mettre en place sa théorie du déterminisme : l'hérédité et l'influence du milieu se conjuguent pour écraser la vie des personnages. La folie et la lente déchéance des personnages semblent inexorables.

Véritable virtuose de l'intrigue romanesque, Zola (une exposition virtuelle est consacrée à Zola sur le site de la BNF) allie étude de tempéraments et intrigue policière. Comme dans ses romans du cycle des Rougon-Macquart, Thérèse Raquin est un miroir de la société du XIXeme siècle, notamment la vie de petits bourgeois : la médiocrité et l'ennui bourgeois sont illustrés par les fameuses soirées du jeudi soir, répétitives et ineptes. Seul le confort matériel intéresse les Raquin. Cependant, Sainte-Beuve critiquait l'invraisemblance de ce roman, où pourtant l'auteur a désiré tout montrer et tout dire jusqu'à décrire le fonctionnement d'une morgue en s'attardant sur la description des cadavres. C'est que l'oeuvre est aussi traversée, par ricochets, par des symboles tels que la cicatrice et n'est pas exempt de passages fantastiques comme la présence d'un spectre dans la chambre du couple adultérin.  Quant au dénouement, il est digne d'une tragédie suscitant terreur et pitié. Un roman sombre mais un de ceux que je préfère de cet auteur...

Zola, Thérèse Raquin, Livre de poche, 234 p.

Mes autres lectures zoliennes : La bête humaine,

27 décembre 2009

Le fantôme de Baker Street de Fabrice Bourland : ISSN 2607-0006

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Ayant apprécié le retour dans le dix-neuvième siècle avec le roman policier La dernière enquête de Dupin, j'ai poursuivi la découverte des romans de cet auteur avec Le fantôme de Baker Street. James  Trelawnay et Andrew Singleton sont deux jeunes hommes de bonne famille jouant aux détectives privés en Amérique. S'ennuyant à mourir, ils viennent sur le continent à la recherche d'aventures palpitantes. Un jour, Mr Conan Doyle vient personnellement leur demander leur aide pour résoudre une série de crimes qui fait trembler tout Londres par leur sauvagerie... Nos jeunes héros se lancent à la poursuite d'un criminel quelque peu surprenant...

Le début du roman est prometteur avec un couple de détectives classiques. Cependant dès les premiers chapitres, l'intrigue verse dans l'ésotérisme : effectivement, Conan Doyle lui-même, à la fin de la sa vie était fasciné par les séances de spiritisme, ce qui explique l'ambiance très surnaturelle. Mais l'intrigue n'est en rien fantastique, elle tombe dans la fantaisie la plus débridée et devient si improbable, que l'enquête ne semble plus qu'une parodie de roman policier... Un fantôme, meurtrier en série ?
Dommage, des crimes imitant ceux de la littérature victorienne était une bonne idée, cependant cela ne suffit pas pour intéresser le lecteur dont l'esprit peut être vite exaspéré par la kyrielle d'événements improbables. Évidemment, le ton n'est pas dépourvu d'humour, par exemple, un chapitre est intitulé " un peu de lecture n'a jamais fait de mal à personne", toutefois l'invraisemblance outrée des situations rend pénible et agaçante la lecture de ce roman policier.

Bourland, Le fantômes de Baker street, 10/18, grands détectives, 245 p.

23 décembre 2009

Les précieuses ridicules de Molière

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Comédie en un acte et 17 scènes, les Précieuses ridicules sont une satire de la vie littéraire de l'époque et l'une des premières pièces de Molière ( biographie ici) : Magdelon et Cathos sont deux filles de bourgeois qui éconduisent Du Croisy et La Grange, sous le prétexte fallacieux qu'ils ne connaissent pas la carte du Tendre, extrait d'un roman de Mlle de Scudéry, représentation concrète de l'itinéraire amoureux, tel que le concevait les précieuses de l'époque. En revanche, elles tombent amoureuses des valets déguisés des deux amants rebutés...

Molière fait ici la satire des coquettes et des excès engendrés par la mode de la préciosité et de la vogue des salons littéraires. Par exemple, une précieuse désignera un miroir par une périphrase "le conseiller des grâces" ou "les âmes des pieds" servent à nommer les violons. L'excès de snobisme des deux demoiselles est tout à fait comique, en décalage avec le bon sens de Gorgibus, le père qui n'entend rien à ces billevesées...
Le comique de farce est présent à travers les deux valets triviaux, des types, plutôt que des individus... et qui reçoivent des coups de bâtons comme tout bon valet moliéresque... Petite pièce alerte, agréable à lire...

8 janvier 2010

Le tartuffe, tome 2, adapté par Duval et Zamzim : ISSN 2607-0006

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J'attendais avec beaucoup d'impatience le nouveau tome du Tarfuffe, après la lecture du tome 1, qui est décidément des plus enthousiasmants et devrait réconcilier les plus récalcitrants avec un classique de la littérature française.

Ce deuxième tome regroupe les actes III, scène 1 à l'acte IV, scène 4 : Orgon s'est donc entiché d'un faux dévot au point de vouloir lui donner sa fille en mariage et de déshériter son fils au profit de Tartuffe. Il tolère même que cet hypocrite fasse la cour à sa femme ! Aveuglé par la fausse dévotion de ce fieffé coquin, il met toute la maisonnée en danger : heureusement que son beau frère Cléante et sa femme Elmire luttent pour rétablir la vérité...

Tartuffe apparaît dans toute sa forfanterie : il est gourmand, vil, menteur et coureur de jupon. Molière a su comme nul autre brocarder la fausse vertu. Tartuffe a beau parler de "haire" et de "discipline", les membres de la famille ne sont pas dupes, excepté Orgon qui est, comme dirait la servante Dorine, "tartuffié".

Le texte étant intégralement reproduit, l'intérêt réside dans la mise en image. Les dessins sont vraiment appropriées, venant illustrer à merveille les défauts dénoncés par Molière : Tartuffe est laid et Orgon niais. Le dessinateur a su rendre plus compréhensible certains passages en rajoutant des scènes, notamment l'épisode de la cassette volée par Tartuffe. Le dessinateur réalise une véritable prouesse en illustrant la célèbre scène de l'aveu de Tartuffe à Elmire : au fur et à mesure de la déclaration d'amour, le paradis remplissant l'arrière plan des cases se transforment en enfer dantesque. Les scènes sont rendues vivantes, avec brio, grâce à des images colorées et imaginatives.

Tartuffe, Tome 2, Duval et Zamzim, Delcourt, 47 p.

billet du tome 1 ici

17 janvier 2010

La dame aux camélias de Dumas fils : ISSN 2607-0006

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Celle qu'on désigne par le surnom de "Dame aux camélias" est une courtisane du nom de Marguerite Gautier. Le narrateur va s'intéresser à son histoire, le jour où à une vente publique, il achète un livre lui ayant appartenu. Quelques jours plus tard, un jeune homme, Armand Duval, fou de douleur, cherche à acquérir le livre qui est pour lui un souvenir indispensable. Intrigué  par ce jeune homme et sa démarche, le narrateur va bientôt se lier d'amitié avec lui et prendre connaissance de l'histoire de Mademoiselle Gautier...

Le début du récit est assez surprenant, le narrateur tenant un discours moralisateur peu commun dans les fictions de cette époque : il en appelle à l'indulgence des lecteurs pour les courtisanes qui sont capables de beaux sentiments et doivent susciter la pitié car elles n'ont pas eu, parfois, l'éducation nécessaire. Ainsi, dans les premières pages, se succèdent des paroles de moralisateurs : "soyons bons, soyons jeunes, soyons vrais ! Le mal n'est qu'une vanité, ayons l'orgueil du bien, et surtout ne désespérons pas" ! Mais que le lecteur ne se décourage pas à la lecture de cette phrase.
En fait, le roman est "dumasficelé", néologisme de Jules Renard, on s'intéresse à cette histoire d'amour dès qu'on lit la dédicace sur le livre acheté par le narrateur : " Manon à Marguerite, Humilité. Armand Duval". Que signifient ces mots ? Qui est Armand Duval ? Bientôt le narrateur découvre la vérité sur la vie de la dame aux camélias qui a vécu une histoire d'amour sincère, désintéressée avec Armand Duval. Si les sentiments amoureux ont l'air si vrai, c'est que Dumas fils les a véritablement vécus, il a lui aussi aimé une Dame aux camélias : la jalousie, les tourments, les mensonges et les concessions sont passionnément racontés par Armand Duval, comme un Swann avant l'heure... On est véritablement entraîné par les rebondissements de cette passion même si parfois, on pressent ce qu'il va arriver.
Dumas revisite un thème connu et le sublime. Devenu un mythe et inspiré d'une histoire vraie, celle de Marie Duplessis, il dépeint les sentiments de ces deux jeunes gens de manière très justes et en donnant des accents dostoievskiens à ses personnages : candeur, péchés et rédemption.
Loin des déchéances des héroïnes telles que Nana, Dumas fait le portrait d'une courtisane repentie et donne une dimension sociale à cet amour qui, s'il peut surprendre ou agacer le lecteur au départ, est plus subtilement fait par la suite. Une très belle découverte très émouvante.

Une lecture du challenge ABC

1 avril 2010

La controverse de Valladolid de Carrière : ISSN 2607-0006

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En 1550, à Valladolid, dans un petit couvent espagnol, une polémique autour du statut des indiens, récemment découverts lors des expéditions espagnoles, fait rage. Une controverse oppose deux hommes radicalement opposés : un dominicain humaniste, Las Casas, et un philosophe Sépulvéda. Ces peuples sont-ils humains ? Ou sont-ils des esclaves nés ? Les deux hommes vont s'affronter avec en arrière-fond un contexte religieux très important.

Le personnage de Las Casas n'est pas sans rappeler un certain Guillaume de Baskerville (Le nom de la rose, d'Umberto Eco) par son humanisme, ses raisonnements. Véritable joute verbale, la rhétorique  des deux hommes est impeccable, que ce soit la persuasion mise en oeuvre par Las Casas en décrivant des massacres sanguinaires pour faire appel à la compassion du lecteur ou la logique implacable mais inhumaine de Sépulvéda n'hésitant par utiliser des comparaisons animales pour parler d'êtres humains.

Cependant, une question plus grave, un sujet plus sérieux est au coeur de cette courte pièce de théâtre, celle du statut des habitants du Nouveau Monde et de la colonisation par les armes. Ces discours sur les races n'ont pas perdu de leur actualité et sont représentés d'une manière dramatique et dynamique pour empêcher toute dimension didactique ennuyeuse. Une pièce à thèse tout à fait convaincante ! Je signale aussi le roman sorti en 1992, en même temps que le film...

Carrière, La controverse de Valladolid, GF, 109 p.

La controverse de Valladolid 2

Film de Jean-Daniel Verharge, avec Jean Pierre Marielle (Las Casas).

En 1991, pour fêter le 500ème anniversaire de la découverte de l'Amérique, un film est commandé à J. C. Carrière, pour la télévision. La pièce de théâtre en est le scénario. Il a un an pour tourner ce film, ce qui explique l'économie des moyens, et son moindre intérêt, une fois le livre lu. Les décors sont sobres et symboliques, plaçant au centre, sur une estrade, une croix et le légat. D'un côté s'agite Las Casas, défendant corps et âme sa thèse, défendant ces indiens qu'il a côtoyés. De l'autre, au contraire, calme et froid, Sépulvéda s'interroge sur le statut de ces peuples tout en usant d'arguments spécieux. Le cadre en contre-plongée permet d'augmenter l'intensité dramatique de ce huis clos, qui même s'il réaménage la réalité historique, a le mérite d'aborder et de mettre au jour une page de l'histoire un peu oubliée. L'accent mis sur le discours des personnages amène un certain statisme des acteurs et confère une certaine lenteur, regrettable.

Lu et vu dans le cadre du challenge lunettes noires sur pages blanches, organisé par Happy few.

15 février 2010

Exposition : "c'est la vie ! Vanités de Caravage à Damien Hirst" : ISSN 2607-0006

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Connaissance des Arts a publié un hors série consacré à l'exposition temporaire, "Vanités de Caravage à Damien Hirst" : "Si le terme de Vanité désigne en premier lieu les natures mortes qui ont prospéré à l'ère baroque, il s'applique plus largement à toutes représentations de la dépouille humaine - crâne, squelette - ayant pour fonction de rappeler fondamentalement vain de l'existence, sa fragilité, sa fugacité face à l'irréductible réalité de la mort. L'image du crâne confronte brutalement le spectateur à son destin, sans détour, sans discussion possible."

"Vanité, tout n'est que Vanité" :

Cette exposition permet de donner une perspective historique aux "vanités" : d'abord, représenté à côté de sablier et de fleurs, pour souligner la vanité des plaisir et la dimension éphémère de la vie, le crâne perd peu à peu sa valeur mystique et est détourné en simple objet par Braque, ou prend une valeur marchande avec For the love of God de Damien Hirst. La mort est omniprésente au Moyen âge, se manifestant à travers la peste, puis les guerres de religion mais sa représentation réapparaît lors des grandes hécatombes des deux guerres mondiales : un crâne constitué de gants et de crayons, une photographie d'une jeune femme portant sur son dos un squelette ! Toutes les oeuvres du XXeme siècle sont assez déconcertantes. J'ai apprécié la diversité des oeuvres et le questionnement philosophique des peintres autour de ce thème. Dommage, il manquait quelques cartouches informatifs pour mieux comprendre les oeuvres contemporaines.

Informations :

« C’est la Vie », au Musée Maillol

du 3 février au 28 juin

61 rue de Grenelle, 75 007 Paris

De 9 à 11 euros

Tous les jours, sauf le mardi et jours fériés, de 10h30 à 19h

23 mars 2010

Jane Eyre adapté par Franco Zeffirelli : ISSN 2607-0006

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Un film de Franco Zeffirelli, avec Charlotte Gainsbourg, William Hurt...

Sans avoir lu l'oeuvre de Charlotte Brontë, j'avais vu la Jane Eyre de Robert Young dont je garde un bon souvenir, un film classique et honnête, et je viens de découvrir celle de Franco Zeffirelli qui m'a complètement fascinée. Quelle belle, émouvante et passionnante histoire ! Tout commence avec l'enfance malheureuse de Jane Eyre, dans une atmosphère triste et tourmentée, où les enfants de l'orphelinat Lodwood sont humiliés, battus et malheureux. Mais déjà Jane Eyre apparaît comme une enfant douée pour le dessin et courageuse, avec un caractère bien trempé. Lorsqu'elle obtient la place de gouvernante dans le château de Rochester, sa vie est complètement bouleversée par la rencontre de cet homme violent et irritable. Qu'est-ce qui a pu briser la vie de cet homme ?

Ce film est tout simplement fascinant. Les paysages enneigés, automnales ou printaniers, de la campagne anglaise sont merveilleux et la première vision du château de Rochester est spectaculaire : il est immense, sombre, un peu délabré, à la manière des manoirs gothiques hantant la littérature britannique du XIXeme siècle. Les reconstitutions de décors, les costumes sont admirables, et nous projettent au côté de la sombre et mince silhouette de Jane Eyre.

Rochester considère Jane Eyre comme un "personnage de conte fée" : et c'est effectivement un personnage qui force notre admiration. Dessinatrice, cultivée et intelligente, Jane Eyre est aussi honnête et vibrante de passion. Charlotte Gainsbourg prête ses traits diaphanes à l'héroïne, "restant calme et grave au seuil de l'Enfer". Des moments touchants, les leçons données à Adèle, la fille délaissée de Rochester, la vie misérable au foyer Lodwood, côtoient des moments dramatiques et inquiétants comme des cris et sanglots qui résonnent dans l'immense et imposant château, des agressions mystérieuses.

Un film dont la beauté des personnages, de l'intrigue et des paysages nous transportent dans un lointain XIXeme siècle...

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